Témoignage de Jeanne

« Ma plus grande peur, c’était d’avoir des jumeaux. Finalement, c’est devenu ma plus grande force. »

Quand j’ai appris ma grossesse gémellaire, j’ai paniqué. Mon mari en rêvait, mais moi c’était ma plus grande crainte. J’avais deux peurs principales : la prématurité et que l’un des bébés prenne la force de l’autre. Les trois premières semaines, je n’arrivais même pas à regarder une photo de femme enceinte de jumeaux, ça me tétanisait. Et puis, petit à petit, quelque chose a changé. J’ai accepté que ce serait notre histoire, notre petite originalité. Mon ventre qui s’arrondissait, le son de ces deux petits cœurs qui battaient… je me suis mise à voir cette grossesse comme une chance exceptionnelle.

À 5 mois, mon col était déjà effacé, et j’ai été hospitalisée quelques jours avec des injections de corticoïdes pour préparer les poumons de mes bébés. Là, j’ai pris conscience que je devais tout faire pour les garder au chaud. Je me suis mise à visualiser chaque soir que je fermais mon col avec un fil de laine – parce que c’était le fil le plus doux que je pouvais imaginer – en faisant des doubles, triples, quadruples nœuds. Et, d’une certaine manière, ça a marché : j’ai gagné 7 semaines précieuses.

J’ai aussi trouvé du réconfort dans les podcasts (merci Bliss), dans les témoignages sur la prématurité, dans les BD comme La naissance en BD. J’ai pu suivre des séances de sophrologie, pas toujours simples pour moi car j’ai du mal à décrocher le cerveau, mais le jour J, ça m’a aidée à visualiser et à respirer. Et puis, j’ai eu la chance d’avoir une amie infirmière et doula, qui a su répondre à mes questions en toute simplicité, sans filtre.

Le 1er septembre, à 3h du matin, j’ai entendu un « POC ». La poche des eaux de Louis venait de rompre. J’étais étrangement sereine, presque prête. Dans la voiture, sous des trombes d’eau, les contractions ont commencé et j’ai tout de suite senti la différence avec celles que j’avais depuis des mois. À l’hôpital, j’étais déjà à 7 cm.

La péridurale, obligatoire pour une naissance gémellaire, a été difficile à poser : huit tentatives, un anesthésiste peu sympathique, 45 minutes interminables. C’est le seul moment négatif que je retiens. Mais dès que j’ai pu reprendre le contrôle, je me suis recentrée. Même sous péridurale, j’avais besoin de sentir, d’être actrice. Et quand elle a commencé à moins faire effet, j’ai eu comme un soulagement : je reprenais possession de mon corps.

Je me suis transformée en une vraie louve. J’ai enlevé mes lunettes, et je n’avais qu’une mission : faire naître mes deux bébés. Mon mari m’encourageait, posait son front contre le mien. Les sages-femmes me guidaient pour positionner mon bassin. Moi, j’étais dans ma bulle, à annoncer mes contractions : « Elle arrive, je suis prête. » Je me sentais forte, transcendée.

À 9h14, Louis est né. On me l’a posé quelques secondes sur moi. Il a pleuré, puis il est parti avec les pédiatres. J’ai pleuré, sangloté, tellement submergée par l’émotion, la joie, la fierté. Quatre minutes plus tard, à 9h18, Arthur est arrivé, en siège. Lui n’a pas pleuré tout de suite, et il est parti très vite avec les médecins, mais quand j’ai entendu sa petite voix quelques secondes plus tard, c’était le plus beau des cadeaux.

J’ai ressenti une vague d’amour et de puissance comme jamais. J’avais donné vie à deux bébés, si petits, mais tellement forts déjà.

Ce qui m’a aidée : ma respiration, la visualisation des vagues, le soutien indéfectible de mon mari, les encouragements et la guidance des sages-femmes. Je n’étais pas seule, j’étais portée.

 Mon message aux futures mamans :
Depuis la nuit des temps, les femmes donnent naissance. Si les autres y arrivent, pourquoi pas toi ? Fais confiance à ton corps, il sait. Fais confiance à l’équipe qui t’accompagne, elle est là pour toi. Et rappelle-toi que chaque naissance est unique, et qu’elle peut être belle, même dans l’imprévu.

Un petit conseil : j’ai adoré lire la BD La naissance en BD de Lucile Gomez. Elle m’a donné beaucoup de force et m’a aidée à voir l’accouchement comme un super-pouvoir.

 Mon astuce au quotidien : quand je me sens stressée, je me répète plusieurs fois « tout va bien » en respirant profondément. Ça m’aide à apaiser mes pensées et à revenir à l’instant présent.